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01/05/2009

NOTES DE REALISATION

Comment communiquer dans un pays divisé ? Comment créer une nation à partir d’un pays composé d’individus culturellement différents ? Comment une nation peut-elle se constituer après une rupture et un traumatisme aussi violents? FAUSTA est la métaphore d’une déchirure. Un pays qui a connu la répression et qui ne peut s’exprimer que par ce qui relève de l’inconscient : ses mythes, ses  peurs et ses traumatismes. Le
corps d’une femme qui saigne exprime le vide qui demande à être habité, l’angoisse qui appelle à être apaisée, la peur de rencontrer quelque chose de différent, de perdre le contrôle. Nous vivons dans un pays réprimé, désorienté dont le témoin principal est le corps.
Mais la mémoire n’est pas le seul enjeu de ce combat. Par quel processus parvient-on à enterrer un passé aussi douloureux ? Un effort de pardon est demandé et nous tentons de préserver l’histoire d’une culture orale réprimée par la culture officielle. Le chant est un mode d’expression particulièrement important pour notre peuple car il nous permet de recréer la mémoire de ce que nous avons oublié.
Mais une mémoire écrite incomplète ne détruit pas la richesse de l’histoire d’un peuple. Elle n’élimine pas non plus son chagrin. En revanche, elle augmente son besoin de s’ exprimer. Le monde andin cherche à se renouveler au travers de festivals, de rituels et de chansons qui opèrent un
retour de la mémoire réprimée dans une forme allégorique. C’est le talent d’une culture naissante, moderne et créative, qui venant des Andes pillées par le terrorisme, manifeste une capacité extraordinaire pour entrer dans un monde qui ne reconnaît ni
sa diversité ni le respect de l’autre.
FAUSTA est un film sur la question de la mémoire non résolue, violente, personnelle et collective. L’histoire d’un fardeau imposé, d’une répression cachée et au final l’histoire d’une guérison. Au delà de la guerre et de ses dégâts, Fausta doit reprendre confiance en elle pour guérir. Mais
ce n’est pas facile, le seul moyen est de se confronter directement au mal. Comme le dit le Minotaure : «  Il n’y a qu’une façon pour tuer le monstre, l’accepter. » Le cheminement de Fausta dans le film est par extrapolation celui que vit le Pérou après une
époque obscure et difficile où la peur, la violence et l’ignorance ont régné pendant des décennies ; mais où perdure encore la sensation de vouloir croiser les doigts en espérant avoir appris la leçon. Et nous ne l’avons peut-être pas encore apprise.
Ce film propose d’être critique avec nous-mêmes, avec nos mécanismes de défense et d’être disposés à affronter les causes de la blessure pour pouvoir commencer à la guérir.

Claudia Llosa

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