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12/05/2009
FAUSTA, de Claudia Llosa

" La comédienne Magaly Solier est belle et grave. Ses complaintes en langue quetchua sont à pleurer." (...) "Le premier long-métrage péruvien présenté au festival de Berlin méritait la récompense suprême." (Les Echos)
" Claudia Llosa a réalisé un film à la fois modeste et ambitieux sur la mémoire, et à travers celle-ci, l'acceptation du passé." (Libération)
" Fausta, le film lumineux venu des andes." (...) "Coincé entre les avant-premières cannoises et les blockbusters de l'été, le bouleversant Fausta, Ours d'Or en février dernier au Festival de Berlin, méritait bien notre coup de projecteur de la semaine" (...) "Fausta distille un charme vénéneux qui gagne rapidement le spectateur, envoûté par l'étonnante comédienne Magaly Solier. Une vraie belle découverte." (Métro)
" Un troublant portrait de femme." (L'Humanité Dimanche)
" La réalisatrice Claudia Llosa a beaucoup de talent." (Le Nouvel Observateur)
Les exactions perpétrées de part et d'autre, de 1980 à 2000, firent 70 000 morts au Pérou, touchant principalement les indigènes. Cette toile de fond, familière à chaque Péruvien, le film s'en dégage aussitôt pour mieux en suivre les effets à travers son personnage principal, Fausta, la fille de la mourante.
Jeune et belle, celle-ci est atteinte du mal que les indigènes ont baptisé par le nom qui donne son titre au film, et qui frappe les enfants allaités par des mères ayant subi dans leur chair la violence de ces terribles années.
Sans aller plus avant dans la description de l'histoire, on tient ici ce que ce film a de plus précieux : sa manière de mélanger le grotesque au tragique, la beauté à la cruauté, la poésie à l'obscénité. Entre le cadavre pourrissant de la mère et la joyeuse industrie du mariage qui sert de gagne-pain à la famille de Fausta, autant dire qu'on navigue ici, à la fois médusés et éblouis, en pleine monstruosité latino-américaine.
Jacques Mandelbaum
Ce film coloré qui commence par un décès est en fait un hymne à la vie où on assiste à plusieurs exubérantes noces. D'ailleurs, dans cette culture tout s'épouse : vie et mort même cohabitent (comme sont superposés robe de mariée et linceul sur et sous le lit) et la mort, avec ses petits vers, est rattachée à la fertilité.
Ce cycle va de pair avec la notion de transmission sur laquelle repose l'intrigue. Comme la pomme de terre ("qui renvoie aux racines et dans le même temps produit des germes qui prennent la direction de l'avenir", a souligné Llosa), Lima vit entre traditions et langue quechua d'une part et modernité de l'autre sans contradiction.
Avec tous ses personnages, l'inventivité de ses détails qui prennent souvent la valeur de symboles (comme la tombe creusée qui devient une joyeuse piscine), la subtilité du portrait qu'il fait d'une culture où les contraires comme les familles cohabitent harmonieusement et se protègent les uns les autres, sa musique, sa photographie, La Teta Asustada est une véritable boîte à trésors basée sur une "barbarie d'informations" (a plaisanté Llosa) soigneusement recherchées qui a déjà séduit le World Cinema Fund de Berlin dès le stade du scénario. Dans l'esprit du film, peut-être la Berlinale bouclera-t-elle la boucle avec une nouvelle récompense.
Bénédicte Prot
Julien Welter
17:09 | Lien permanent | Commentaires (0)
01/05/2009
Bande-Annonce du film FAUSTA
Télécharger le FA en haute déf en cliquant ici.
23:01 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fausta
NOTES DE REALISATION
Comment communiquer dans un pays divisé ? Comment créer une nation à partir d’un pays composé d’individus culturellement différents ? Comment une nation peut-elle se constituer après une rupture et un traumatisme aussi violents? FAUSTA est la métaphore d’une déchirure. Un pays qui a connu la répression et qui ne peut s’exprimer que par ce qui relève de l’inconscient : ses mythes, ses peurs et ses traumatismes. Le
corps d’une femme qui saigne exprime le vide qui demande à être habité, l’angoisse qui appelle à être apaisée, la peur de rencontrer quelque chose de différent, de perdre le contrôle. Nous vivons dans un pays réprimé, désorienté dont le témoin principal est le corps.
Mais la mémoire n’est pas le seul enjeu de ce combat. Par quel processus parvient-on à enterrer un passé aussi douloureux ? Un effort de pardon est demandé et nous tentons de préserver l’histoire d’une culture orale réprimée par la culture officielle. Le chant est un mode d’expression particulièrement important pour notre peuple car il nous permet de recréer la mémoire de ce que nous avons oublié.
Mais une mémoire écrite incomplète ne détruit pas la richesse de l’histoire d’un peuple. Elle n’élimine pas non plus son chagrin. En revanche, elle augmente son besoin de s’ exprimer. Le monde andin cherche à se renouveler au travers de festivals, de rituels et de chansons qui opèrent un
retour de la mémoire réprimée dans une forme allégorique. C’est le talent d’une culture naissante, moderne et créative, qui venant des Andes pillées par le terrorisme, manifeste une capacité extraordinaire pour entrer dans un monde qui ne reconnaît ni
sa diversité ni le respect de l’autre.
FAUSTA est un film sur la question de la mémoire non résolue, violente, personnelle et collective. L’histoire d’un fardeau imposé, d’une répression cachée et au final l’histoire d’une guérison. Au delà de la guerre et de ses dégâts, Fausta doit reprendre confiance en elle pour guérir. Mais
ce n’est pas facile, le seul moyen est de se confronter directement au mal. Comme le dit le Minotaure : « Il n’y a qu’une façon pour tuer le monstre, l’accepter. » Le cheminement de Fausta dans le film est par extrapolation celui que vit le Pérou après une
époque obscure et difficile où la peur, la violence et l’ignorance ont régné pendant des décennies ; mais où perdure encore la sensation de vouloir croiser les doigts en espérant avoir appris la leçon. Et nous ne l’avons peut-être pas encore apprise.
Ce film propose d’être critique avec nous-mêmes, avec nos mécanismes de défense et d’être disposés à affronter les causes de la blessure pour pouvoir commencer à la guérir.
Claudia Llosa
14:42 | Lien permanent | Commentaires (0)